L’île d’Ometepe est située sur l’immense lac Nicaragua. Comparativement, le département de la Savoie s’enfile avec aisance entre les contours du lac. En étant sur la rive Est de l’île, l’illusion d’un océan est bien fondée. L’île est accessible par ferry en 1h de traversée depuis San Jorge et c’est dès l’embarcadère du continent qu’elle se caractérise par ses deux cônes culminants à plus de 1500m d’altitude. Le volcan Conception toujours actif émet en permanence un nuage qui se scotche comme une lentille sur son cratère. Le Maderas, plus petit et éteint, est recouvert d’une jungle apportant un paysage dense et habité. C’est de son côté que l’on décide de poser pour une petite semaine dans un rythme tranquille et reposant.
Hacienda Merida
L’arrivée sur l’île d’Ometepe est vécue comme un retour à l’authentique. Ici, le temps semble s’être arrêté, les charrettes à boeufs font office de moyen de locomotion et le linge et la vaisselle sont lavés directement dans le lac. Les femmes sont à l’action tandis que les enfants barbotent autour d’elles. Les hommes quand à eux font le shampoing ou la sieste. Quand la pièce principale d’une maison se trouve dans l’eau, on peut faire beaucoup de choses avec la famille réunie !
Depuis l’hacienda Merida sur la rive Ouest, nous apprécions le charme discret de l’île depuis ses rivages à l’abri du vent. De là s’improvisent sans difficultés des sorties en kayak pour observer les singes, des couchers de soleil depuis la muelle, des repas contemplatifs et même des retrouvailles avec Juliette et Vincent rencontrés à Bacalar, au Mexique. La route est défoncée pour y arriver, mais c’est surement une des meilleurs places pour séjourner sur Ometepe.
Cascade San Ramon
La cascade est accessible après quelques km de pistes depuis l’hacienda Merida. S’en suit ensuite 5km de marche raide pour atteindre les chutes accrochées au flan du volcan Maderas. Nous marchons la tête en l’air à regarder les singes araignées sauter d’arbres en arbres et une fois là haut, transpirants, la cascade devient une douche pour celui qui veut se rafraichir.
En guise de souvenir, Maman se foule la cheville à peine 2km avant d’arriver au départ du sentier. On les finira en stop pour ne pas mettre à mal la douleur silencieuse qui fait serrer ses dents !!
L’ascension du Maderas : les pieds dans la boue
La Finca El Porvenir, située juste avant la piste de l’hacienda Merida, nous permet de changer de place pour 3 nuits le temps d’être plus mobile sur l’île compte tenu du mauvais état de la piste en aval. Plus d’accès au lac, mais une belle flore tout autour du site. De là, nous pouvons partir à l’assaut du Maderas en laissant maman reposer sa cheville dans un cadre plutôt relaxant !!
Le Conception est tellement impressionnant que nous préférons faire l’ascension de son voisin moins couteux en effort physique. Le Maderas est cependant connu pour ses sentiers ultra-boueux, moins exigeant dans le souffle mais assez difficile pour les conditions de marche, 8h annoncées sur un petit 1000m+. Les filles ont eu le choix de rester sur place plutôt que de s’user sur une randonnée éprouvante, mais l’appel du défi a été trop fort. Elles monteront avec nous au lac du cratère, trop contente de jouer dans la boue sans retenue. N’en déplaise à Maman, nous partons sans guide seulement à l’aide de notre application maps.me qui sert aussi bien de GPS pour les autos que sur les sentiers de randonnée.
A peine 2h de marche après le mirador, la boue nous colle déjà aux semelles. Et c’est peu dire ! Au début, on essaye d’éviter tant bien que mal les passages tendancieux mais c’est une réflexion complètement inutile vu la suite du sentier. La veille les coureurs de l’ultra trail « Fuego y Agua » ont foulé ce même sentier, autant dire qu’aujourd’hui il est pire que détruit ! Nos pas s’enfoncent systématiquement sous des cm de boue à en perdre nos chaussures, on nous avait prévenu mais comme à chaque fois c’est par sa propre expérience que l’on comprend les mises en garde ! En cours de chemin, un guide nous interpellera pour nous freiner dans l’élan. Selon lui, c’est dangereux de monter seuls, avec des enfants et vu l’heure nous rentrons en pleine nuit. Pas pire pour décourager !! Après nous avoir clairement incité à rebrousser chemin, on reste confiant tout en se donnant une limite de temps à ne pas dépasser avant d’atteindre le cratère. Et les groupes en descente que nous croiserons ne feront que nous encourager, impressionnés par la rapidité de montée des filles.
Par chance, le temps est dégagé et nous permet de superbes points de vue sur le Conception et le lac du cratère. Vu l’humidité présente sur ce volcan, les nuages sont très souvent accrochés ne permettant qu’une randonnée à l’aveugle dans une ambiance mystérieuse. Nous arrivons dans nos temps là haut bien trop contents d’avoir gardé confiance. Par contre, vu l’heure on ne fera pas la sieste au bord du lac comme les autres ! La descente sera encore plus difficile que la montée sans aucune prise et des gamelles assurées à chaque passage sinueux. Cette randonnée c’est juste un parcours du combattant ! Avec une motivation bien accrochée et une patience indispensable, on aura finalement eu besoin que de 6h30 pour faire l’aller/retour. Par contre, de retour à la finca aucun d’entre nous n’aura eu le courage de décrasser les chaussures et chaussettes couvertes de terre séchées jusqu’aux chevilles.
Ojo de Agua
A la Finca El Porvenir nous retrouvons avec joie et pour quelques jours les copains d' »Escapade en famille » lâchés lors de notre arrivée sur le Nicaragua à Somoto. Ils étaient attendus au Costa Rica et ont du tracer tout en gardant à l’esprit de remonter pour découvrir le pays et nous rejoindre une dernière fois par la même occasion.
Pour rendre le séjour sur Ometepe encore plus parfait, il existe sur l’île un lieu de baignade dans une eau de source cristalline. Les touristes se mélangent dans une ambiance locale. De là, nous pouvons nous attabler et prendre nos aises pour squatter un bout de place et passer la journée entre bières et piña colada proposées sur place. Simple mais efficace surtout après la sortie sportive de la veille ! Ensemble, nous dégusterons les meilleures pizzas de toute l’Amérique centrale dans un petit pueblo voisin, nos papilles ont tellement savourées que ce repas reste réellement mémorable ! La pizza El Meditaranee en plein Nicaragua franchement, fallait l’imaginer !
Après ces journées passées ensemble à la Finca, vient l’heure de se séparer. Les amis font cap au Sud, nous au Nord, et nous prévoyons de garder quelques jours pour la laguna Apoyo avant le vol retour de Maman. Cette fois-ci c’est la séparation inévitable mais étant tous savoyards, nous imaginons d’ici les fondues et raclettes qui nous partagerons de retour dans nos contrées !
Le retour en ferry se fera à l’improviste sans réservation et par chance, nous trouvons un bateau à quai qui s’apprête à partir alors que cet horaire n’est pas prévu dans les départs habituels. Par contre, la compagnie est ce coup-ci trop réglo et nous force à porter des gilets de sauvetage pendant l’heure entière de traversée… Rassurant ?!
Les volcans sont maintenant dans notre dos, l’île d’Ometepe aura été un vrai coup de coeur qui concentre pour nous le meilleur du Nicaragua : une ambiance locale, un tourisme discret, de belles randonnées, des volcans à gravir, de la baignade, des points de vue remarquable, des couchés de soleil, le tout dans une végétation dense avec une faune à observer. Ce serait notre étape incontournable et autant en profiter rapidement puisque nous apprenons en partant qu’Ometepe est en sursie. Un projet de canal qui rejoindrait l’océan Pacifique à l’océan Atlantique a été contractualisé par les chinois depuis quelques années. Même si les villageois de la côte pacifique ont réussi à ralentir le projet, il y a fort à parier, avec les puissances économiques en jeu, que bientôt des bateaux de croisière et cargos de marchandises traverseront le lac pour dénaturer cette authenticité.